Les Commandes de Lily

Dimanche 12 avril 7 12 /04 /Avr 08:00

« Ma douce amie », « ma belle catin »,  « ma toute tendre », « ma pute aimée »…

Voilà les mots qu’il emploie pour m’écrire ses lettres d’amour vache, de douceur sauvage, de passion animale.

Ses lettres de corps, de chair, de sueur mâle.

Ses lettres d’amoureux sale.

Car l’homme m’aime… à sa façon.

Si je l’aime, moi ? … à ma façon.

Je le retrouve une fois, deux fois par mois…

Dessous ma porte, il passe, se glisse chez moi.

Intrus désiré.

Sa peau est papier où les mots glissent, se tordent pour mordre mes yeux qui le caressent.

À moins que ça ne soit l’inverse.

Cet amant-là me couche sous sa plume, m’allonge dans des calligraphies qu’aucun Kama-Sutra, aucune Carte du Tendre ne saurait dessiner.

C’est à la pointe de sa verge qu’il m’écrit la rencontre de nos désirs.

Monsieur taille sa plume en me racontant comment je le ferais, moi.

Lui tailler une plume…

En ai-je seulement envie ?

Parfois, nous nous croisons, dans la vie, la vraie, celle où les gens marchent debout… ou essayent.

Parfois nous nous croisons, au détour d’un prétexte, pour respirer, de loin, la peau de l’autre.

On joue alors à ne pas se connaître, à ne pas se savoir. Intimes.

Il s’assied à une terrasse, je m’assieds derrière, ou à côté.

Jamais à sa table.

On joue à ne pas s’aimer.

Il fait glisser ses feuillets pour que je les lise là, à côté.

Il aime m’entendre soupirer, à peine, sentir que je fonds à quelques centimètres de lui.

Plus tard, après, quand je le retrouve dans une enveloppe, sous ma porte, il m’avoue une érection continue.

Continue, pendant toute la durée de ce café.

Le temps se suspend, sa queue aussi.

Moi je ne suce que la cuiller qui a servi à touiller mon café.

Libre !

Je suis libre.

De le lire, de le déchirer ou de l’aimer, mon homme de papier.

Je dis MON homme… c’est tendre.

On ne s’appartient pas.

Jamais.

Libres.

On se dit « vous », d’ailleurs.

Comme pour sublimer ces mots crus qu’il m’écrit.

Comme pour marquer, aussi, son respect, même quand il me traite de garce.

« Vous, petite garce, innocente, magnifique et provocante »

Moi je fonds.

Je lis avec mon ventre.

Ça palpite, là.

Ça s’emballe.

Ça chauffe.

J’aime ça.

Personne pour voir.

Personne pour sentir mon trouble.

Dans ses mots je suis femme.

Je suis muse.

Sa muse.

Je suis belle, chez moi.

Je suis belle chez lui, quand il m’écrit.

Jamais pourtant, jamais sa peau ne rencontrera la mienne.

Monsieur ne bande que dans ses mots.

Je brûle au moindre contact.

Nous sommes amoureux de papiers.

Passionnés, furieux, exaltés.

Amoureux de papiers.

Des centaines de pages.

Cachées sous mon matelas.

Pour réchauffer mes rêves que je n’avouerai pas ici.

Je ne lui raconte rien, moi.

Mais il sait.

Je rougis, mes yeux se baissent.

Je lis jusqu’au bout.

Et parfois, parfois…

Là, en bas…

Je…

Mais chuttttt…

« Ma douce amie », « ma belle catin »,  « ma toute tendre », « ma pute aimée »…

Et juste là, au fond de l’enveloppe, séchée, collée, l’encre blanche de son plaisir.

Par Mademoiselle Winola - Publié dans : Les Commandes de Lily
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Jeudi 9 avril 4 09 /04 /Avr 08:00

C’est un champs fertile où poussent les chrysanthèmes, mais ici, un rectangle d’herbe tendre verdoie avec fureur. Tout semble mieux pousser dans ce rectangle là.

C’est ici que finissent les enfants de Madame.

En creusant plus profond, on trouverait aussi nombre de ses amants, de ses courtisans, de ses serviteurs… et l'ancien maître des lieux.

Tous amputés de la main droite pour l’avoir désirée de trop, de trop près.

Madame suspend les membres coupables aux baldaquins de sa chambre noire.

Elle en est la reine.

D’un geste, d’un mot, elle les commande.

Toutes ensembles s’emparent de son corps et c’est alors l’ivresse des plaisirs interdits.

Des mains mortes sur ce corps vivant, un corps qui donne la mort, des mains qui ne vivront plus et pourtant, l’animent.

Et de les sentir, partout à la fois, entrant en elle comme l’eau dans le sol à la suite d’une trop grande sécheresse.

Et la voilà qui fond, qui coule de toute part, fontaine dans la nuit, sirène dans son lit, elle se noie dans son eau.

Et personne pour boire, et personne pour voir, quand le soir point, qu’elle pleure de ne savoir aimer, de ne point tenir l’amour dans son poing.

Car Madame est main de velours acérée dans un gant de fer blanc, qui voudrait tout étreindre mais se gorge de vent.

Elle qui croyait tout posséder, c’est l’amour qui la tue en lui faisant défaut.

Elle n’est qu’un corps sans âme et sans chaleur.

La lueur froide de ses regards reflète le manque qui la hante comme un vent glacé soufflant dans les grandes salles d’un manoir abandonné…

Madame est une grande demeure hantée, un temple païen déserté, une poupée voodoo oubliée…

Madame est une ogresse, une gorgone, une mante religieuse… cruelle…

Mais Madame est belle aussi, ses joues de poupée attirent le chaland qui ne sait voir ses quenottes acérées…

Madame sait allumer d’un regard la torche de vos désirs, messieurs, de vous elle ne fera qu’une bouchée.

Mais vous, mesdames, réjouissez-vous, ce soir Madame a un petit creux, ce sont vos maris qu’elle veut !

Que tous les gauchers se lèvent et quittent la salle, Madame n’aime que les membres droit !

 

Par Mademoiselle Winola - Publié dans : Les Commandes de Lily
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Lundi 6 avril 1 06 /04 /Avr 08:00

Il est venu, à la nuit tombée, troubler mon repos minéral, mon sommeil de pierre, de plume, de plomb, ma sombre nuit !


J'étais allongée là, les yeux clos, les mains jointes sur mon ventre vierge. Ma longue chemise blanche protégeait mon corps frais des regards indiscrets, dans ces lieux où, pourtant, je suis seule à dormir. En paix !

Qui donc aurait l'idée de venir me visiter, moi, la petite Louison, fille de rien, mais digne, toujours même quand je dors.

Oh, bien sur, nul ne se soucie plus de moi, j'ai eu 16 ans le mois dernier.

On a dit, hier, au couvent des Capucines (-c'est là qu'on m'a élevée), que c'était finalement une bonne chose que je sois partie, cela libère un lit pour la petite rouquine qu'on a retrouvé affamée sur le paillasson de monsieur l'Abbé Michel.


J’ai désormais un espace qui n’appartient qu’à moi, il y a même mon nom sur la plaque !

Louison Baudoin ! Baudoin, c’est parce que je suis née un 17 octobre, du moins c’est ce qu’on croit, il fallait bien mettre une date, pour l’état civil. Et les orphelins dont on ne connaît pas les parents, dans mon village, on leur donne pour nom de famille, le nom du saint du jour ! Alors je m’appelle Louison Baudoin.

Mais au village, on m’appelle Louison tout court, la p’tite Louison pour les vieux dégoûtants qui soufflaient sur mes jupes quand je traversais la place.

En parlant de seins, ils avaient pas l’air de lui déplaire, au bougre qu’a défoncé les verrous, hier !

Oui, non parce que c’est de lui qu’on était venus causer, vous et moi !

J’ai commencé à avoir des seins vers 11 ans, les bonnes sœurs disaient de moi que j’étais précoce ! Précoce, ça veut dire qu’on a la poitrine qui se lève tôt ?!

Bref, il est venu hier, un homme… Charmant au demeurant.

Quand il a ouvert, j’ai entr'aperçu la nuit, et son uniforme de sergent qui se découpait sous la lune.

Il était beau, j’en eu le souffle coupé.

Je restais là, hébétée, à le voir sans le voir, incapable du moindre mouvement.

Un vrai pantin la Louison !

Lui, par contre, c’était autre chose ! Il se doutait bien que si quelqu’un le surprenait, il n’aurait pas de quoi faire le fier !!! Agité qu’il était !


Il s’est allongé sur moi, de tout son long… Il soufflait fort !

Sur ses mains chaudes, je sentais l’odeur de la terre humide et l’odeur du métal froid !

Est-ce que tous les militaires sentent comme ça ? Mais mon sergent d’hier, c’était la terre et le fer ! Un minéral quoi ! Et pourtant, brûlant, bouillonnant comme les feux de l’enfer !

Au bout d’un moment, il a commencé à concentrer ses mouvements en un centre bien précis, à la jonction de nos deux centres, en fait.

Son corps s’agitait désormais en une seule force, pressant sa pine contre mon ventre, comme s’il avait voulu me transpercer de sa raideur !

Et moi je reste là, rigide, attendant que ça se passe… C’est pas au couvent qu’on m’aurait appris ce qu’il fallait faire dans une telle situation…

Mais il s’impatiente à nouveau, cherchant à me déshabiller… Et il faut croire qu’il a du mal, d’autant que je ne l’aide absolument pas. Il sort alors une petite lame, aiguisée, luisante pour découper ma chemise du col jusqu’aux pieds…


Le sergent est pressé, pas aussi délicat dans ses gestes que dans ses traits et c’est ma peau qu’il lacère en même temps que le tissus… Une grande ligne rose qui me coupe en deux, comme pour marquer la ligne de démarcation, ne pas faire de jalousie entre sa main gauche et la droite, mon sein droit et le gauche…

Une frontière incisée qu’il semble surpris, d’abord, d’avoir tracé sur ma peau nue puis qu’il lèche lentement. Sa langue part de mon cou et descend lentement entre mes seins, il s’y arrête un instant, inspire mais c’est plus fort que lui, il descend encore, laissant courir ce petit bout de chaire rouge jusqu’à mon ventre, mon nombril qui me rattacha un jour à ma mère, ma toison fournie, odorante et juste en dessous, mon sexe !

Ma vulve est la fente originelle, l’incision sur laquelle aboutit la sienne et tout m’apparait alors logique… Il n’a fait que prolonger ma césure de femme ! Il marque ainsi la ligne claire qui distingue en moi le bon du mauvais, la femme de l’enfant, le pur et le pêché !

Et voilà qu’il se met à le combler, ce gouffre en moi… est-ce sa lame, est-ce la verge qu’il arborait plu tôt ? Je ne sais, je ne sens rien… Je suis absente.


Il s’agite, s’agite encore… Ses yeux brillent dans la nuit, pour un peu, il baverait l’animal !

Je n’ai pas le temps de respirer qu’il a déjà ouvert mon corps en deux, libérant ainsi le labyrinthe de tripes, de chairs, de boyaux que renferme mon ventre blanc.

Sang, bile et merde en transit se répandent sous son regard gourmand, dément…

Et le voilà qui se branle, empoignant mes viscères à pleine main, remontant sous ma cage thoracique pour serrer mon petit cœur d’oiselle dépucelée… Il m’aime !

Du bout de sa lame il dessine des soleils roses autour de mes tétons, une incision pour chaque giclée de sperme dont il inonde mes chairs offertes à sa vigueur…

Je m’appelle Louison, et le sergent Bertrand m’aime fort comme deux soleils !

Ce soir, au regard de dieu, je suis une femme, enfin !

 

Il s’est redressé, épuisé et comblé…

Mais en quelques secondes j’ai vu son regard changer… de l’extase, il est passé au dégout, de lui, de moi…

Il est sorti de la fosse en vitesse. A mains nues, il a repoussé la terre sur moi. J’ai dit adieu à la lune, à mon beau sergent, adieu au monde.

Je m’appelle Louison Baudoin, je suis morte en pucelle, je repose désormais en femme, amoureuse, écorchée. Je me présenterai fière devant Dieu d’avoir libérée ce bon sergent de ses tourments…

Je ne craindrai pas le diable, s’il veut de moi. Jamais ne faillirai devant ses cornes, ni sa fourche, ni sa queue !

Entre les deux, mon cœur balance… si aucun ne prend ma main, je resterai une âme errante…

 

Je reviendrai, à la nuit tombée, troubler son repos minéral, son sommeil de pierre, de plume, de plomb, sa sombre nuit ! Mon beau sergent…

 

Par Mademoiselle Winola - Publié dans : Les Commandes de Lily
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Dimanche 5 avril 7 05 /04 /Avr 18:51
Il y a quelques temps, une amie m'a demandé de lui écrire un texte pour une représentation théâtrale sur le thème de la perversion.
Allez donc savoir pourquoi, elle a tout de suite pensé à moi.
La belle ayant déjà une petite idée derrière la tête me soumet plus précisément, comme point de départ, l'histoire du sergent Bertrand... Tout un programme...
Je fais mes petites recherches et découvre que le sergent en question était un charmant nécrophile comme on les aime...
Tant bien que mal j'exécute ma commande... en prenant soin de remplir comme je peux le cahier des charges... "il faudrait que ça soit un peu poétique... et puis que ça soit du point de vue de la jeune femme ...", "l'idéal serait qu'on sème des indices tout au long du texte mais qu'on ne découvre qu'à la fin qu'elle est morte", etc.

Un mois plus tard je rend mon devoir... mais il s'avère que finalement le texte est trop... enfin c'est le sujet qui est trop... enfin... Trop pervers peut-être ?!

J'avais en parallèle proposé un autre texte plus court à la demoiselle, mais pas beaucoup plus léger... trop lui aussi...

Enfin je m'étais un peu éloignée de la perversion pour revenir vers des paraphilies plus classiques, plus charmantes, moins écoeurantes...

Bref, j'ai écris trois textes que j'ai décidé de publier ici puisque finalement ils n'existeront pas sur les planches pour l'instant...

Tenez-vous prêts à faire connaissance, dès demain, avec le sergent Bertrand...

Perversement votre,

Mademoiselle W.
Par Mademoiselle Winola - Publié dans : Les Commandes de Lily
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